- Par Frédérique Moutsi, Master en sciences des religions et de la laïcité // pour ACTION INVISIBLE
Ceci est le premier article d’une trilogie dont la problématique est le rapport qu’entretiennent les trois grandes religions monothéistes à l’égard des animaux.
Souvent diabolisées à cause de leur rituel d’abattage, le judaïsme et l’islam passent pour avoir peu d’éthique animale. Le christianisme, quant à lui, s’intègre totalement dans notre mode de vie et ne pose a priori aucun problème de moralité vis-à-vis du monde animal. Pourtant, comme nous le verrons dans l’article suivant, la théorie de l’animal machine, consacrée des siècles plus tard par Descartes, est issue du monde chrétien.
Par ailleurs, le passage de la Genèse 1 : 26-31, souvent lu à l’aune des Bibles chrétiennes a créé une confusion monumentale dans l’imaginaire collectif. En effet, ce passage est considéré comme étant à l’origine de l’hybris humaine et accuse à tort la tradition vétéro-testamentaire. Ce problème vient du fait que la langue d’origine de la Torah est l’hébreux. Par conséquent, sachant qu’un verbe ou un mot peut avoir plusieurs sens, une traduction peut tout en étant correcte s’éloigner du sens originel du texte surtout si la traduction n’est pas faite par un savant de la tradition.
Notre approche n’est pas théologique mais plutôt philosophique et dénuée de toute croyance si ce n’est en celle de la vie et du respect du vivant.
Nous commencerons par l’article traitant du judaïsme car d’un point de vue historique, c’est la première des trois grandes religions monothéistes. Nous l’entamerons par le fameux passage de la Genèse 1, 26-31 afin de montrer qu’il existe au moins deux traductions possibles impliquant alors des sens opposés. Ces différences reposent essentiellement sur deux verbes en hébreux : râoâh et kâbash. Tout d’abord, nous nous baserons sur la traduction de la Bible TOB, bibile oecuménique chrétienne, car elle contient précisément le sens très répandu dans le monde occidental de l’homme dans son rapport au vivant et à l’environnement. Ensuite, la traduction de l’évangéliste Bienvenu Kone nous permettra de faire état d’une lecture alternative au sein du christianisme. Enfin, nous reprendrons la traduction et l’explication du Grand Rabbin de France, Haïme Korsia, afin de clarifier la confusion qui règne sur ces versets.
Cette approche nous autorisera dès lors à montrer qu’il n’y a aucune contradiction entre Genèse 1, 26-31 et la présence d’une éthique animale forte au sein du judaïsme que nous tenterons de démontrer à partir de plusieurs passages issus de différentes sources de la tradition juive. Quelle est la place de l’animal dans le judaïsme ? Quel comportement l’homme doit avoir à l’égard des animaux ? Quelle est l’origine du carnivorisme et quelle place est faite au végétarisme ? Bien entendu, les passages que nous avons sélectionnés pour répondre aux questions de cet article ne sont pas exhaustifs mais ce sont a priori les passages les plus souvent cités en faveur de la cause animale.
Nos sources principales sont : La Bible TOB (Tanakh) ; Le Talmud ; Code of Jewish Law ; Le Midrash Rabbah ; Le Midrash Tanhuma ; Le Noda Ben Yehuda de Yehezqel Landau ; Le Guide des Egarés de Maïmonide ; La thèse de Caroline Dewhurst, Protection animale et judaïsme : Compréhension des lois de la Torah concernées, et exemples d’applications de nos jours ; Le mémoire de Bienvenu Kone, Evangélisation et promotion humaine.
Le judaïsme
« Dieu dit : “Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il soumette les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, les bestiaux, toute la terre et toutes les petites bêtes qui remuent sur la terre. Dieu créa l’Homme à son image, à l’image de Dieu il le créa ; mâle et femelle il les créa. Dieu les bénit et leur dit : “Soyez féconds et prolifiques, remplissez la terre et dominez-la. Soumettez les poissons de mer, les oiseaux du ciel et toutes bêtes qui remuent sur la terre!” Dieu dit : “Voici, je vous donne toute herbe qui porte sa semence sur toute la surface de la terre et tout arbre dont le fruit porte sa semence ; ce sera votre nourriture. À toute bête de la terre, à tout oiseau du ciel, à tout ce qui remue sur la terre et qui a souffle de vie, je donne pour nourriture toute herbe mûrissante.” Il en fut ainsi. Dieu vit tout ce qu’il avait fait. Voilà, c’était très bon. Il y eut un soir, il y eut un matin : sixième jour.» Genèse 1, 26-31
Il s’agit ici de la version de la Bible TOB 1. D’aucuns considèrent ce passage comme l’origine de l’anthropocentrisme. Effectivement, les verbes “dominer” et“soumettre” corroborent avec la vision supérieure qu’à l’homme actuel de lui-même par rapport aux autres espèces et à la nature. Cette traduction aurait donc ouvert la porte à l’exploitation sans mesure d’une nature désacralisée. Pourtant, d’après Bienvenu Kone, si l’on se réfère à l’hébreu de ces deux verbes râoâh et kâbash, on s’aperçoit qu’il s’agit là d’une traduction orientée vers cette vision anthropocentrique du monde. Or, le verbe râoâh que la Bible TOB traduit par “dominer” signifie plus précisément “gouverner” mais dans lequel s’insère la notion très importante de soin, d’attention. C’est pourquoi on peut le traduire par “prendre soin”. Quant au verbe kâbash, bien qu’il puisse signifier “assujettir”, “fouler aux pieds”, il peut aussi signifier “prendre possession sur permission du souverain” dans le sens classique du Proche-Orient ancien, à savoir gérer une terre, bien l’administrer. C’est ce sens-là qu’il faut comprendre dans la Genèse, à savoir qu’Adam et Eve sont amenés à bien gérer la création de Dieu, avec intelligence. « À une nuance de violence (JOB18, 1 ; 2Sm8, 11), ce terme est utilisé pour décrire la conquête de la terre promise qui est une responsabilité particulière du Roi. En effet, le roi a pour fonction de promouvoir la justice et la paix avec une préoccupation pour les faibles. Ainsi la fonction royale de domination est un service pour la justice, la paix, l’harmonie dans le monde créé par Dieu et non pas pour l’exploitation du monde à des fins personnelles »2. D’ailleurs, Exode Rabbah 2, 2, va dans ce sens car Moïse, après avoir secouru un agneau, sera choisi pour devenir celui qui servira de guide au peuple d’Israël. En étant bon avec un agneau, Dieu comprit qu’il serait bon avec son peuple.
Le Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, rappelle que traduire ces verbes par “dominer” et “soumettre” est un fait chrétien. Selon lui, il faut traduire “dominer” par “cultiver” et “soumettre” par “garder”.
Que ce soit la version du Rabbin ou celle de Kone, une hiérarchisation explicite est présente où l’homme même bon est celui à qui revient le pouvoir de prendre soin et d’administrer le monde. L’homme est au-dessus des autres espèces dans un rapport responsable et protecteur à l’égard de la création. L’homme a un rôle de gardien du monde.
En tout cas, il s’avère que ces deux traductions (Kone/Korsia) conviennent bien mieux à la logique interne au judaïsme. En effet, si l’on se réfère aux différentes sources judaïques, on constate que la compassion pour la vie animale existe et qu’il n’est absolument pas permis aux hommes d’exploiter ou de faire du mal gratuitement à un animal. Pour preuve, le concept de tsaârbaâlei ‘haïm qui correspond à l’interdiction de causer de la souffrance animale est capital dans la tradition juive. Il s’agit d’une «expression hébreu qui veut dire littéralement « la souffrance de la bête vivante » : ce principe inclut à la fois les lois de la prévention de la cruauté aux animaux, l’obligation de porter secours aux animaux en détresse, et l’injonction de toujours agir envers eux avec bienveillance »3. Iltrouve son origine dans l’Exode 23, 5 : « Si tu vois l’âne de celui qui te haît succomber sous sa charge, et que tu hésites à le décharger, tu l’aideras à le décharger » mais le concept en tant que tel se trouve dans le Talmud – Baba Metsia 32b.
Rabbi Solomon Granzfried conformément au tsâarbaâlei ‘haïm insiste sur le fait qu’« Il est interdit, en accord avec les lois de la Torah, d’infliger une souffrance à quelque créature vivante que ce soit. En sens contraire, il est de notre devoir de soulager la douleur de chaque créature, même sans être propriétaire des biens d’un non-Juif »4.
De plus, dans la Torah, des prescriptions existent quant à la manière de se comporter face à une mère et ses petits. Dans le Deutéronome 22, 6-7, il est ordonné de faire partir la mère si l’on veut prendre ses oisillons. Dans Lévitique 22, 28, Dieu s’adresse à Moïse en ces termes :
«Mais n’égorgez pas le même jour une bête, vache, brebis ou chèvre, et son petit ». Maïmonide voit dans cette injonction le fait qu’il ne soit pas possible de tuer les deux (la mère et son petit) ensemble « de telle manière que le petit ne soit tué à la vue de la mère, parce que la souffrance des animaux dans une telle circonstance est immense. Il n’y a pas de différence en ce cas entre la souffrance des gens et la souffrance d’autres êtres vivants, parce que l’amour et la tendresse de la mère pour son jeune petit n’est pas produite par le raisonnement mais par le sentiment, et cette faculté existe non seulement chez les gens mais chez la plupart des choses vivantes »5. Manifestement, les sentiments des animaux sont reconnus ainsi que leur souffrance psychique qui doit être évitée.
L’expression hébraïque néfèsh qui signifie “l’âme illustre” parfaitement nos propos.Néfèsh est appliquée indistinctement aux animaux et aux humains. Les animaux sont donc pourvus d’une âme et sont dignes de respect. C’est pourquoi dans les Psaumes 145, 9, nous pouvons trouver cette affirmation: « Dieu est bon envers tous et ses compassions s’étendent sur toutes ses créatures ». Tout comme Dieu, l’homme doit être bon envers les animaux et le Talmud – Yevamot 79 de déclarer que les juifs doivent être : «Miséricordieux, même envers son bétail, car la véritable compassion et la pitié sont l’ornement des Israélites ».
En outre, d’après la tradition talmudique, les animaux sont également dotés de la capacité de saisir un ordre et de la faculté de comprendre, voilà pourquoi les sages du Midrach Rabbah expliquent que les attributs d’intelligence et de la perception requis pour comprendre les plans divins ont été donnés : « Non seulement à l’homme, mais aussi également au bétail et aux autres animaux, comme il est dit « à qui l’Éternel avait donné intelligence et discernement en eux », or le mot » en eux » s’écrit avec les mêmes lettres que le mot BEHEMA, animal. Et cela veut donc dire que la sagesse fut donnée à l’homme et à l’animal. »6. Le Midrach Tanhouma Va‐yakel4 relève également que : «Dieu n’apas donné la sagesse à l’homme uniquement, mais aussi à l’animal domestique et à l’animal sauvage ». Enfin, le Talmud contient beaucoup d’exemples à propos de l’intelligence animale7.
Par ailleurs, le quatrième Commandement exige que les animaux comme les personnes doivent se reposer le jour du Shabbat8. Cela signifie qu’ils doivent être libres de courir et de paître librement le jour du Shabbat.
Toujours en lien avec le tsâarbaâlei ‘haïm, le Talmud stipule qu’ “une personne ne devrait pas manger ou boire avant d’avoir nourri ses animaux”9. Comme les animaux domestiques sont dépendants de nous, il est cruel pour ces derniers qu’ils soient affamés alors que nous mangeons.
En revanche, un célèbre rabbin du 13e siècle, Nahmanides penser que Dieu place le besoin de l’homme au dessus de la vie de l’animal :« Sa pitié n’est pas étendue à la vie de l’animal au point de nous interdire de réaliser nos besoins à leurs dépends, car si cela avait été le cas, Il nous aurait interdit de les tuer. Plutôt, la raison de cette interdiction est de nous enseigner le trait de compassion, et que nous ne soyons pas cruels ». Ainsi, l’homme peut utiliser l’animal s’il en a un réel besoin qui peut s’étendre parfois jusqu’au plaisir. Ceci peut être considéré comme une pente glissante. En effet, dans la même lignée que Nahmanides, le Rabbi Isserlin perçoit, en théorie, comme conforme à la Torah de couper la queue d’un chien ou autre acte chirurgical si cela occasionne un plaisir pour les yeux de l’homme. L’expérimentation animale dans le cadre d’une utilité médicale est également acceptée bien qu’il y ait là différents points de vue sur les motifs de l’expérience et sur les traitements que reçoit l’animal.
Sur un autre plan, dans le passage de la Genèse 1 : 29-31, cité antérieurement, nous pouvons constater qu’à l’origine, l’homme et la femme sont végétariens. En effet, Dieu leur donne pour seule nourriture herbe et fruits. Les animaux non plus ne sont pas encore carnivores. Pour cela, il faudra attendre la sortie d’Adam et Eve hors du jardin d’Eden. Dans Esaïe 11, 6-9, la prophétie eschatologique d’Esaïe confirme la vision édénique de la Genèse: « Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau. Le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira. La vache et l’ourse auront même pâture, leurs petits même gîte. Le lion, comme le boeuf, mangera du fourrage. Le nourrisson s’amusera sur le nid du cobra. Sur le trou de la vipère, le jeune enfant étendra sa main. Il ne sera fait ni mal, ni destruction sur ma montagne sainte, car le pays sera rempli de la connaissance du Seigneur, comme la mer que comblent les eaux.». Que nous disent ces passages ? Il semblerait qu’il y ait une conscience aïgue de la fatalité de la prédation. Les hommes et les animaux sont devenus des prédateurs depuis la sortie d’Eden mais c’est un mal car cela cause de la souffrance à toutes les créatures. À cette époque-là, l’homme comme l’animal sont des proies. Ainsi, tous deux rentrent dans le cycle de la vie où le mangeur peut devenir celui qui est mangé et ainsi restaurer sa dette vis-à-vis de celui qui a été mangé. C’est la logique du don contre-don de la nature dans laquelle l’homme s’inscrivait mais dont il s’est éloigné petit à petit en décimant les prédateurs de ses lieux de vie.
Quoi qu’il en soit, les juifs ont reçu le droit de manger de la viande. Et c’est à Noé que Dieu donne ce “droit”. À partir de ce moment-là, l’homme gardien du monde ne l’est plus grâce à Dieu mais par la méfiance qu’il inspire aux autres créatures. Dans Genèse 9 : 1-5 : « Dieu bénit Noé et ses fils, il leur dit :“(…) Vous serez craints et redoutés de toutes les bêtes de la terre et de tous les oiseaux du ciel. Tout ce qui remue sur le sol et tous les poissons de la mer sont livrés entre vos mains”. Bien entendu, ce passage encore une fois peut justifier les desseins machiavéliques de certains hommes froids et dénués de scrupule. Gardons en mémoire tout de même qu’il est avant tout le gardien de la création et n’oublions pas que de nombreuses sources hébraïques prescrivent à l’homme d’être bon envers les animaux. Une oeuvre ne peut être comprise que dans son ensemble pour saisir les nuances qui sont apportées, les contradictions qui peuvent y exister.
En effet, le peuple hébraïque n’a absolument pas le droit ni de manger n’importe quel animal ni de le tuer de n’importe quelle manière. Nous ne détaillerons10 pas ici quels animaux sont tahor (purs) ou tame (impurs), nous nous bornerons au rituel d’abattage. Lecho’het (boucher) doit être instruit et pieux. L’animal doit être en bonne santé. La lame du couteau parfaitement aiguisée de façon à ce qu’elle puisse sectionner rapidement et précisément sous la main du cho’het les artères principales reliées au cerveau. Il est dit que la lame doit être excessivement fine pour que la section se fasse sans causer de douleur à l’animal. L’impératif majeur est que l’animal souffre le moins possible. Si lecho’het doit vider l’animal de son sang, c’est parce que ce dernier est considéré comme l’âme vivante de l’animal, le néfèsh11.
De plus, les aliments consommés acquièrent l’identité de celui qui les ingère. De ce fait, dans le Talmud, Pesa’him 59b, il n’est pas moral de manger des animaux sauf dans le cas où l’on poursuit un but saint et spirituel : « C’est alors seulement quel’homme réalise le maximum de son potentiel et ainsi, l’animal se trouve élevé, pourrait-on dire, au niveau de l’”humain” »12.
En ce qui concerne la chasse, le rabbin du 18e siècle Yehezqel Landau explique dans son célèbre Noda Ben Yehudaque chasser pour le plaisir s’oppose à l’interdiction de faire souffrir un animal et à l’interdiction de détruire quoi que ce soit si ce n’est dans un but constructif. Elle rendrait, en outre, la viande impropre à la consommation surtout si l’animal est chassé avec un arc ou un fusil. Enfin, la chasse, nous dit le rabbin, pervertirait l’âme des hommes et de prendre comme exemple Esaü et Nemrod, deux grands chasseurs de la Bible, qui sont passésde la chasse du gibier à celle des femmes pour finir par tuer des hommes. Aussi, n’est-il pas recommandé aux descendants d’Abraham, Isaac et Jacob de suivre de tels modèles. La pèche n’est autorisée que pour se nourrir et n’est en aucun cas licite pour le plaisir.
Conclusion
Nous avons éclairci le passage de la Genèse 1 : 26-31, en montrant qu’une autre traduction existait et se présente plus proche des valeurs que le judaïsme véhicule en son sein. Aussi, l’homme n’est plus le maître omnipotent sur terre mais celui qui prend soin de la terre et l’administre avec respect. S’il suscite de la crainte aux autres créatures, c’est parce qu’il est entré dans la spirale de la chaîne alimentaire. A l’époque, il était tout aussi susceptible d’être mangé que de manger lui-même sa proie. Enfin, il semble que le carnivorisme soit considéré comme une punition vu qu’au commencement aucune créature ne se nourrissait de chair.
En fonction de nos sources relatives au bien-être animal issues de l’ensemble de la tradition judaïque, le concept de tsaârbaâlei ‘haïm en découle logiquement et nous pouvons affirmer que le judaïsme possède bien une éthique animale. Toute sa tradition en est imprégnée. En effet, cette éthique repose sur le fait que l’animal est perçu comme un être sensible doté d’une âme, de sentiments et d’intelligence. L’homme se trouve néanmoins dans une position supérieure à l’animal : à la fois interdit de cruauté à leur égard, certains rabbins pensent que l’homme peut s’en servir en cas de besoin.
Peut-être que cette éthique est encore trop faible pour certains. Il est vrai que le végétarisme annule en soi la mise à mort de l’animal et que d’autre mouvement tel que le véganisme supprime son exploitation. Toutefois, n’est-ce pas déjà un moindre mal que de respecter les animaux de leur vivant et d’adoucir leur mort ?
Actuellement,l’élevage et l’abattage industriels sont des plus inhumains et nombreux sont ceux qui arrêtent de manger de la viande après s’être informés sur les conditions de ces pauvres bêtes. Peut-on considérer que ce genre d’élevage est conforme au tsaârbaâlei ‘haïm?
En Belgique par exemple, pour abattre un animal, l’éleveur ou le boucher est obligé de passer par un abattoir conforme. C’est donc à la chaîne que les animaux sont tués l’un après l’autre dans un état de stress épouvantable. Même les animaux de la filière casherdoivent passer par ces abattoirs. Par conséquent, on peut également s’interroger sur la légitimité de l’appellation cacher. En effet, le cacher13s’inscrit dans une dimension éthique beaucoup plus large que le simple abattage rituel.
En tout cas, si tous les préceptes juifs concernant les animaux étaient respectés, n’en déplaise aux détracteurs de l’abattage sans étourdissement, la manière d’élever l’animal et de le mettre à mort serait beaucoup plus respectueuse de la vie animale quel’élevage et l’abattage industriel majoritaire en Occident.
Comme il est excessivement difficile de se sortir de cette industrie de la grande consommation, certains juifs se dirigent vers le végétarisme14. Et depuis longtemps déjà, de nombreux rabbins se positionnent en sa faveur, se référant notamment aux origines végétarienne de l’homme : Rabbi Abaraham Isaac Kook, RabbiSha’ar Yashuv Cohen, Chaim Zundel Maccoby…
1 Traduction œcuménique de la Bible.
2 B. Kone, Évangélisation et promotion humaine, Bamako, Mémoire de Licence Canonique, 2009 : http://www.memoireonline.com/06/09/2158/m_Evangelisation-et-Promotion-Humaine26.html
3 C. Dewhurst, Protection animale et judaïsme : Compréhension des lois de la Torah concernées, et exemples d’applications de nos jours, Paris, Thèse pour le Doctorat Vétérinaire, Faculté de médecine, 2010, p. 9.
4 Rabbi Solomon Granzfried, Code of Jewish Law, New-York : Hebrew Publishing Co., 1961, Livre 4, chapitre 191, 84. Voir aussi Rabbi Samson Raphaël Hirsch, Horeb, chapitre 60, section 416.
5 Maïmonide, Guide des Égares, trad. de l’arabe par Salomon Munk (1856-1866), nouvelle édition revue et mis à jour sous la dir. de René Lévy, avec la coll. de Maroun Aouad, Lagrasse, éd. Verdier, 2012, 3, 4.
6 Exode Raba 48 : 19‐20
7 Pour plus de détails, voir C. Dewhurst, ibidem, p.21.
8 Exode 20 : 8-10 ; Deutéronome 5 : 12-14.
9 Guémara Bérah’ott, 40a.
10 Pour plus de détails : Olivier Assouly, Les nourritures divines. Essai sur les interdits alimentaires, Actes Sud, 2002.
11 Pour plus de détails, voir C. Dewhurst, Protection animale et judaïsme … op.cit., pp. 114-118
12 La rabbinite Feige Twerski et le Rabbin Shraga Simmons, Judaïsme et végétarisme, trad. Claude Krasetzki : http://www.lamed.fr/index.php?id=1&art=934.
13 Religieusement acceptable pour l’usage approprié.
14 Richard Schwartz, The Schwartz Collection on Judaism, Vegetarianism, and Animal Rights, Jewish Vegetarians in North America :http://www.jewishveg.com/schwartz/index.html
Voir aussi : https://www.jewishvirtuallibrary.org/jsource/Judaism/rabbinicveg.html ;http://www.lamed.fr/index.php?id=1&art=934 ; http://www.jewishveg.com/francais/ja.html